Notre troupe s'est trouvée confrontée à deux reprises une interdiction de jouer une œuvre, du fait de l’existence d’une « EXCLUSIVITE », au profit de gros producteurs.

Que penser d'un système qui confisque la représentation d’une œuvre au profit de grosses sociétés de production?

Concernant la première pièce , INCONNU A CETTE ADRESSE, la situation dure depuis la période COVID, ce qui représente un nombre d’années d’exclusivité qui auront largement permis au producteur de récupérer son investissement de « création ». Mais cette exclusivité est prolongée jusqu’en 2027 !!! D’autres troupes avant la notre ont été empêchées de jouer cette pièce (Exemple : Compagnie La Passerelle ARGENTAN déjà en 2016 !!! ). Durant toutes ces années, un texte qu’on peut sans exagération qualifier « d’essentiel » au regard des problématiques qu’il traite ne peut pas être diffusé en milieu rural, ni auprès de scolaires par exemple, alors que bon nombre de professeurs nous ont fait part de l’intérêt que cette pièce représente à leurs yeux, et de la manière dont sa représentation s’intègrerait parfaitement au cursus des classes de collège ou lycée.

Notre troupe a écrit à M DUMONTET, détenteur de l’exclusivité sur cette pièce, pour obtenir une tolérance pour présenter cette pièce, moyennant un périmètre géographique restreint, et le paiement par notre troupe d'une contribution au titre du droit d'auteur. Ce courrier n’a mérité réponse , ce qui montre la considération portée au théâtre « amateur » et au milieu rural. Nous ne pensons pas faire « concurrence » aux théâtres professionnels, notre public n’est pas le même, et nous nous efforçons de monter des projets au plus près des gens.

Le système d’exclusivité contrevient au principe de diffusion de la culture. Comment peut-on encore maintenir une telle pratique ?

Nous concernant, l’autre pièce concernée par ce principe d’exclusivité est LE DINER D’ADIEU, au contenu plus léger. Nous avons pu la représenter en Mayenne et dans l’Orne à plusieurs reprises avant l’été 2023, mais avons dû annuler sur un semestre toutes les représentations pour lesquelles nous avions un engagement à l’automne , car une exclusivité a été posée dans l’intervalle. Ces annulations sont pénalisantes pour une petite troupe, car les recettes tirées des représentations permettent parallèlement à l’association , récemment agréée Espace de Vie Sociale, de financer des activités pour les personnes isolées, ou à moindre ressources.

L'impact est encore plus grave pour les troupes professionnelles : exemple de cette troupe rencontrée en juillet 2023 à Avignon où elle venait promouvoir son nouveau spectacle, et qui venait d'apprendre qu'elle en serait empêchée de jouer à partir de janvier 2024 du fait de ce principe d’exclusivité. Pour elle, au-delà de la frustration liée à la non présentation d’un travail qui a nécessité des mois de préparation, c’est toute la question d’un équilibre financier qui se pose. (Voir article de Télérama ou notre association de Saint Pierre des Nids est d’ailleurs mentionnée ). Est-ce normal ?

Il serait temps que les politiques se saisissent de cette aberration et la fassent évoluer. Le droit des auteurs n’est pas qu’un droit financier, c’est aussi un droit à être joué le plus souvent possible.

Notre troupe est bien évidemment totalement d’accord sur la notion du droit d’auteur, juste rémunération d’un travail de création, mais espère avec impatience des évolutions sur des points que nous estimons témoigner d’une dérive.